Les dispositifs d’aides fiscales à l’innovation – Crédit d’Impôt Recherche (CIR), Crédit d’Impôt Innovation (CII) et statut de Jeune Entreprise Innovante (JEI) – sont de nouveau au centre des discussions. Avec la publication récente du projet de loi de finances pour 2025, les inquiétudes se multiplient dans le monde des startups et des PME. Ce texte, élaboré dans un contexte politique tendu, redessine le financement de l’innovation et soulève de nombreuses questions quant à l’avenir de ces aides.
Dans cet article, faisons le point sur ce que prévoit le projet de loi de finances et voyons pourquoi des raisons d’être optimistes persistent malgré les incertitudes.
Le Projet de Loi de Finances 2025 : Ce qu’il Faut Savoir
Un Contexte de Rédaction Difficile
Le projet de loi de finances 2025 a été rédigé en un temps record, une situation inhabituelle liée aux récents bouleversements politiques en France. La dissolution de l’Assemblée nationale cet été et la formation d’un nouveau gouvernement fin septembre ont contraint le Premier ministre Michel Barnier à proposer un budget en quelques jours seulement. Comme il le souligne lui-même :
« C’est un budget perfectible, j’ai dû le construire en quinze jours, jamais un Premier ministre n’a dû le faire en quinze jours, ce n’est pas possible de tout faire bien. »
Dans ce contexte, les aides fiscales à l’innovation sont sous haute surveillance, et plusieurs dispositifs essentiels sont remis en question.
Crédit d’Impôt Recherche (CIR) : Maintien du Dispositif
Le CIR, avec une enveloppe annuelle de 6,9 milliards d’euros, demeure la principale niche fiscale en France pour l’innovation. Bien qu’il fasse régulièrement débat, le projet de loi de finances 2025 ne propose pas de modifications pour ce dispositif, ce qui constitue une bonne nouvelle pour les entreprises qui bénéficient de cet avantage pour financer leur recherche et développement.
Crédit d’Impôt Innovation (CII) : Vers une Suppression ?
Le CII, mis en place pour soutenir la conception de prototypes et l’installation pilote de nouveaux produits, pourrait ne pas être reconduit au-delà de 2024. Initialement prolongé jusqu’au 31 décembre 2024, ce crédit n’est pas mentionné dans le projet de loi actuel. Concrètement, les entreprises pourront encore déclarer leurs dépenses d’innovation pour l’année 2024 en 2025, mais après cette date, le dispositif pourrait être supprimé.
Statut de Jeune Entreprise Innovante (JEI) : Fin des Exonérations
Le statut JEI permet aux entreprises nouvellement créées de bénéficier d’exonérations de charges sociales pour le personnel en R&D. Ce soutien financier, représentant en moyenne 47 000 euros d’économies par entreprise, pourrait disparaître dès janvier 2025, selon le projet de loi de finances pour la sécurité sociale. Cette suppression représenterait une lourde charge supplémentaire pour les startups et PME, déjà souvent contraintes par des budgets serrés.
Crédit d’Impôt de Collaboration de Recherche (CICo) : Une Mise en Conformité Européenne
Enfin, le Crédit d’Impôt de Collaboration de recherche (CICo) devrait être mis en conformité avec les règles européennes. Ce dispositif vise à renforcer la collaboration entre entreprises et centres de recherche, une dimension clé pour l’innovation en France.
Pourquoi Rester Optimiste ?
Un Large Soutien Parlementaire
Dès la publication du projet de loi, une levée de boucliers s’est formée au sein des parlementaires, tous bords confondus, pour défendre les aides fiscales à l’innovation. Près de 80 amendements ont déjà été déposés pour préserver ces dispositifs, et une mobilisation sans précédent s’observe autour du CII et du statut JEI. Des partis tels que Renaissance, le Parti socialiste, la France insoumise, Les Républicains et même le MoDem et Horizons se sont manifestés en faveur d’une prolongation du CII et du maintien des exonérations du statut JEI.
Un Appel du Premier Ministre à l’Amélioration
Michel Barnier a publiquement reconnu que le projet de loi nécessitait des améliorations, déclarant :
« Je demanderai à mon gouvernement de s’appuyer davantage sur le travail parlementaire : propositions de lois, amendements, recommandations des commissions d’enquête ou d’information, évaluation des politiques publiques. »
Ce message ouvre la voie à des ajustements potentiels qui pourraient préserver les dispositifs d’aide fiscale dans une certaine mesure. Il montre aussi la volonté de l’exécutif de prendre en compte les recommandations des différents acteurs concernés.
Un Scénario Déjà Connu : Prolongations de Dernière Minute
Le climat d’incertitude entourant le CII et le statut JEI n’est pas nouveau. Ces dispositifs ont souvent été prolongés à la dernière minute. En 2021, par exemple, la prolongation du CII n’a été confirmée qu’après des discussions parlementaires et plusieurs amendements. De même, le statut JEI, en 2019, avait été prorogé pour trois ans à la suite d’amendements déposés quelques semaines avant la clôture des débats.
La situation actuelle n’est donc pas exceptionnelle, et de nombreux acteurs restent confiants quant aux chances de voir ces dispositifs réintroduits lors des discussions parlementaires.
Ce Qu’il Faut Retenir pour les Entreprises Innovantes
Le projet de loi de finances 2025, encore en cours d’examen, pourrait marquer un tournant pour les aides fiscales à l’innovation. Si le CII et le statut JEI ne sont pas renouvelés dans le texte actuel, les soutiens parlementaires et l’appel du gouvernement à des améliorations laissent penser que des changements sont possibles.
La première phase de discussions parlementaires débutera le 21 octobre 2024, et des modifications pourraient être apportées jusqu’à la fin novembre. Les entreprises, notamment les startups et PME innovantes, doivent suivre attentivement ces débats pour adapter leurs stratégies en fonction de l’évolution des aides disponibles.
Pour l’instant, même si le projet de loi de finances semble restrictif, l’histoire récente des aides fiscales montre que ces dispositifs, jugés essentiels pour le tissu économique français, sont souvent maintenus grâce à des interventions parlementaires. L’avenir du financement de l’innovation reste donc entre les mains des décideurs, et les acteurs de l’innovation peuvent garder une certaine dose d’optimisme.
Verdict : Une attente optimiste mais vigilante
Le projet de loi de finances 2025 marque un premier jet perfectible pour le financement de l’innovation en France. Si le CII et le statut JEI sont menacés, des amendements et l’intervention des parlementaires pourraient bien sauver ces dispositifs essentiels pour les startups et PME. Dans un climat incertain, il est plus que jamais essentiel pour les entreprises de rester informées des évolutions législatives et de se préparer à d’éventuels ajustements dans leur financement de l’innovation.
Le mois de novembre sera décisif, et le soutien parlementaire massif est un signe encourageant. Restez à l’écoute des prochains amendements : ils seront déterminants pour l’avenir du financement de l’innovation en 2025.